mercredi 15 août 2007

Le mal être est-il le moteur des sociétés contemporaines ?

Il est 3 h du matin. La pluie bat son plein sur les volets de ma fenêtre. Impossible de dormir. C'est toujours dans ces moments de solitude que l'on se met à réfléchir sur les conditions de notre existence. Je suis bien au chaud dans mon lit avec tout ce dont j'ai besoin autour de moi. Pourtant dehors il pleut... Et là j'ai une envie soudaine de me triturer l'esprit à la fourchette à escargot : sommes nous fait pour être heureux ?

Nous, petits bourgeois nantis et trop fiers pour l'admettre, vivons à une époque formidable dans un pays formidable. Le XXème siècle nous aura apporté tout ce que nos ancêtres ont convoités depuis des millénaires. Ainsi nous avons acquis en quelques décennies le confort, la "liberté", la démocratisation de la démocratie, la télévision, l'internet, la pénicilline, un frigo toujours rempli et des kebabs ouverts 24/24. Que demander de plus ? Rien. Ah si... on attend toujours la TVA à 5,5 % pour les restaurateurs. Avec tout ça Pierre, Paul et Jacques devraient avoir le sourire figé façon Joker et pourtant... Quand on regarde un peu autour de nous, même juste quelques secondes, on peut se rendre compte que le progrès, qu'il soit technologique ou social, ne nous aura pas donné les fruits de ses ambitions.
En 2007, jamais les psychologues n'auront été aussi riches tout comme les laboratoires d'antidépresseurs dont les profits réunis suffiraient à acheter tout un continent. Les jeunes sont de plus en plus adeptes des mines à l'alcool ("indispensables pour s'amuser" mais surtout indispensables pour ne pas déprimer). Le taux de suicide est en hausse exponentielle. Bref, je vous annonce officiellement la fin du genre humain. Bon sérieusement, tout le monde n'est pas encore au point de se passer la corde au coup mais avouons que le fléau de la déprime devient préoccupant, surtout chez les jeunes, comme le souligne de nombreux psychothérapeutes.

Mais revenons à notre nuit pluvieuse et tâchons de savoir pourquoi notre bienfaitrice société contemporaine subit une météo capricieuse. Je n'ai pas la prétention d'apporter la réponse parfaite façon Alexandre Adler. Toutefois regardons un peu ce qui ce passe autour de nous et prenons le petit papouasien sur son atoll (sans Antoine). Il n'a pas de micro-onde, pas de frigo, pas de Qui veut gagner des Millions à 19h sur TF1, pas de Kebab ouvert 24h/24... Est-il malheureux pour autant ? Non. Pourquoi ? Parce qu'il n'a pas la "tentation d'avoir envie". A vrai dire cette situation est semblable à tout ceux qui ont l'incultisme de la BigMac Culture et du moteur à essence. L'Afrique était un continent heureux jusqu'à ce que l'homme blanc ne leur offre l'envie qu'il ne pourrait jamais satisfaire.
Le malaise est d'autant plus présent dans les mondes industralisés où l'envie est la carotte que nous ne pouvons jamais atteindre . L'ultra-libéralisme qui nous entoure donne toujours envie d'avoir envie sans jamais être satisfait et de nous transporter dans le cercle sans fin de la nouvelle consommation aussi appelée "haute fréquence d'achats éphémères à bas coût". Notre société nous impose une concurrence omniprésente, non pas entre entreprises, mais entre chaque être humains. Pour nous sentir normal et intégré, il nous faut à tout prix le dernier portable, la dernière télévision et pour ceux qui feraient de la résistance à la doctrine du renouvellement intempestif, la société s'arrange pour que vous vous sentiez sous-équipés et par conséquent handicapé dans votre vie quotidienne.

Mais au delà du produit, il y aussi l'être humain. La dictature de la beauté est également un symptôme du syndrome de la société contemporaine. Encore une fois le vilain pêché qu'est l'envie, est sacralisé et code des normes exigentes voir surréalistes. Tout le monde veut être parfait voir sur-parfait. (Je reviendrais dans un futur billet sur la publicité à ce propos). Il suffit de jouer à Second Life pour comprendre que les gens se détestent et jouent systématiquement un rôle pour se promouvoir d'une meilleure reconnaissance et se donner l'illusion d'un bien être. Le monde d'aujourd'hui nous regroupe pour mieux nous isoler.


Le mal être des individus est le facteur le plus compétitif pour doper la courbe ridicule appelée croissance. Se sentir mal donne envie d'aller mieux et de se laisser berner par les mirages du bien être édifiés par le 5ème pouvoir de ce monde : le pouvoir financier.

Attention! Il est vrai que ce billet fait copain-copain avec de grandes thèses altermondialistes. Toutefois je ne crois pas que revenir à l'âge de pierre soit la solution pour être heureux. Par nature, l'être humain cherche à évoluer (et donc progressivement à périr) donc remonter le temps est proprement ridicule. Personnellement je pense que le bonheur passe par une quête difficile mais pas impossible : se satisfaire de ce que l'on a et surtout de ce que l'on est. Concrètement il faut encadrer le progrès et en tirer le meilleur parti. La médecine, la liberté d'expression, manger à sa faim restent des avancés incontestables. L'acceptation de soi est aussi le meilleur moyen pour plaire. Ce n'est pas parce que l'on est "beau" que l'on est plus intéressant ni meilleur au lit.

5 commentaires:

ludovic a dit…

Ton article et extraordinaire. Tu as vraimment un style d'écriture plaissant. J'aime beaucoup le sujet. Enfin il est vrai que dans notre monde le probléme et que l'on ne se contente pas de ce que l'on à on veut toujours plus.

Anonyme a dit…

C'est marrant parce que ce billet résume et explique une réflexion que je me faisais aussi ces derniers temps. C'est sans doute une vision libérale de l'être humain : il n'est jamais satisfait, il veut toujours plus ou toujours "mieux" même s'il a tout. C'est pourquoi comme disaiT ce bon vieux Hobbes "l'homme est un loup pour l'homme"... et au pasage il oublie de dire que l'homme est un loup pour lui même aussi. En tout cas bravo pour ce billet.

Anonyme a dit…

Pour moi, c'est le fric à placer en haut de l'échelle des pouvoirs (si t'as pas de fric, tu peux rien faire...) et sans retourner à l'âge de pierre, je me demande parfois si une "régression" ne ferais pas de mal (regarde les aborigènes d'Australie... comme tu le dis pour les africains, ils étaient vachement heureux avant qu'on n'en fasse des esclaves). Mais franchement, je te dis chapeau bas, tu as réussi à résumer une philosophie de vie en concentrant un maximum d'idées dans un style clair et concis... Je suis admiratif. Bravo

Anonyme a dit…

bien interressant... mais difficile d'y apporter de la lumiere.
je reviendrais lire un peu plus tes pensements et rêves flexions ardus.
bien a toi,

Lou

ps/ pourquoi el mariachi?

El Mariachi a dit…

Merci pour toutes vos réactions! ;-) (et vos compliments aussi!)

Eh oui j'avoue que Fight Club a pas mal influencé mon point de vue sur ce sujet. Bien sûr je ne suis pas devenu anarchiste pour autant rassurez vous lol, enfin quoique... (Paulo sors de mon corps!!!!)

LOU > pour "EL MARIACHI", je te renvois à un article antérieur sur les... mariachis! lol Ca vient surtout du film Desperado et de la curieuse fascination que j'ai pour la culture mexicaine. Mais en fait, rien de bien commun avec moi lol (je suis en train de casser le suspense là, merde!)

A bientôt
Tom